La vie-nification n’est pas un long fleuve tranquille.
« Quand le vin est tiré, il faut le boire », dit le vieil adage. Oui, mais avant cela, il faut le… vinifier ! C'est justement ce qui nous occupe depuis les vendanges du Regent la semaine dernière.
Vous n'ignorez rien, cher lecteur, des étapes du processus de vinification. L'égrappage-foulage, avec son cortège de joyeusetés à vous mettre un chai sens dessus-dessous, n'a donc plus de secret pour vous.
André a battu le rappel des troupes. Ce samedi matin, une équipe d'activistes, sur le pied de guerre, écoute les consignes.
C'est simple : il faut sortir nos jolies grappes des cuves saturées en CO2 où elles ont sommeillé pendant une semaine, les passer à la moulinett… enfin, je veux dire : dans l'égrappoir-fouloir, afin de séparer les rafles des grains et mettre en contact la pulpe et la peau, et enfin placer le tout en cuve. Facile, non?
Bon, allons à l'essentiel :
Personne n'est tombé dans la cuve, même si on craignit pour Olivier au vu de ses acrobaties. Un fort joli spectacle ma foi, digne des Nuits du Cirque. Dommage pour ceux qui ont raté ça.
Le raisin était tout beau. Tandis que Barbara tournait la manivelle de l'égrappoir avec ardeur, Christophe se donnait des airs de Congolais pilant le manioc dans son village natal. Tanja et Paul ôtaient paisiblement les rafles.
Une belle quantité de jus s'était déjà déposée au fond de la cuve, qu'il fallait récupérer. A-t-on jamais vu tableau plus réjouissant ? A-t-on jamais entendu plus douce musique que celle du précieux liquide coulant au fond du seau ? J'en ai même vu qui en buvaient en cachette. J'ai les noms !
La pulpe ainsi recueillie au moyen de grands bacs fut ensuite versée dans la cuve par des gestes amples et musclés que ponctuaient les splotch ! et les splatch ! résonnant puissamment contre les parois en inox, et les projections sur les visages, lunettes, et vêtements. C'est d'ailleurs un tonitruant « T'aurais pu mettre un autre pantalon ! » qui accueillit votre serviteur de retour à la maison. Les taches de jus de raisin sont, il est vrai, du plus bel effet sur du beige clair…
Encore quelques manipulations et secrets de chai, et notre attention se tourna vers les bouteilles, mangeailles sortis d'on ne sait où. Mmmmm ! les rillettes apportées par Douglas et Barbara… Quand l'amalgame des différences devient éclectisme…
Nous avons bien travaillé. « La vie-nification n'est pas un long fleuve tranquille » me souffla André à l'oreille. Mais la vérité, chacun sait cela, est dans le vin.
Philippe Le père plante la vigne Son fils fait le vin Son petit-fils saura pourquoi (Dicton)